La TVA peut-elle être sociale ?
par

« Choc fiscal » au profit essentiellement des plus riches, augmentation
de la TVA pour tout le monde, serait-ce le scénario à peine caché du
gouvernement ? Pour essayer de faire passer la pilule, l’adjectif «
sociale » a été accolé à TVA avec, pour faire bonne mesure, l’argument
de la lutte contre les délocalisations.
Quel que soit le vocabulaire employé, les faits sont têtus et la TVA
reste un impôt injuste qui pèse plus lourdement sur les ménages les
plus modestes : les 10 % des ménages les plus pauvres consacrent 8,1 %
de leur revenu à la TVA contre 3,4 % pour les 10 % les plus riches. Ce
chiffre ne dit d’ailleurs pas toute la réalité des faits car les
ménages les plus pauvres consacrent, en proportion, plus de produits à
taux de TVA réduit que les plus riches. Augmenter la TVA, pour quelque
raison que ce soit, est une mesure qui, indolore pour les riches,
accablera la grande masse des Français.
La TVA « sociale » est présentée comme un moyen de financer la sécurité
sociale en réduisant les cotisations sociales patronales qui
représentaient 236 milliards d’euros en 2005. La législation européenne
interdit de dépasser le taux de 25 % de TVA. Dans la version la plus
extrême, le relèvement du taux réduit (5,5 %) et du taux normal (19,6
%) aboutirait à un rendement supplémentaire de 90 milliards d’euros ce
qui correspond à un allègement de 38 % des cotisations sociales. Ce
chiffre doit être revu à la baisse car il existe déjà de nombreux
allègements ciblés de cotisations sociales qui vont jusqu’à 1,6 Smic.
Quoi qu’il en soit, il s’agirait d’une baisse très importante des
cotisations patronales. Il s’agirait d’un transfert financier
considérable au bénéfice des entreprises et au détriment des ménages.
Il s’agirait, de fait, d’une baisse du salaire socialisé perçu par les
salariés, les cotisations patronales étant partie intégrante du
salaire. Cela revient à imposer davantage le travail puisque la
consommation procède, pour l’essentiel, de l’utilisation des revenus du
travail.
La TVA « sociale » peut-elle protéger les salariés contre les
délocalisations ? Pour ses promoteurs, en baissant le coût du travail,
on lutte contre les délocalisations. Pour que cet argument ait une
petite validité, il faudrait que la baisse du coût du travail induite
par cette mesure puisse compenser le différentiel salarial existant
aujourd’hui avec des pays comme la Chine ou même avec les pays de
l’Europe de l’Est. Or il n’en est rien. Sans même parler des salariés
quasi esclaves de la Chine ou d’autres pays, le coût du travail est
environ 5 fois moins cher en Pologne et 7 fois moins cher en Lituanie.
Une éventuelle baisse des cotisations patronales sera sans effet au vu
de tels écarts. Prétendre qu’une baisse des cotisations patronale
protègerait des délocalisation apparaît comme une pure vue de l’esprit
ou, plus sûrement, comme un simple discours de propagande
Certes les entreprises préfèrent toujours payer leurs salariés le moins
cher possible. Mais ce n’est évidemment pas le seul critère pris en
compte sinon il y a belle lurette qu’il n’y aurait plus aucune
entreprise en France ni dans aucun pays développé. D’autres critères
sont pris en compte comme la productivité du travail, l’état des
infrastructures, l’existence d’un marché potentiel… Sur tous ces points
la France est particulièrement bien placée, ce qui explique son
attractivité pour les capitaux étrangers, la France étant parmi les
pays qui attirent chaque année le plus de capitaux.
Pour l’Union syndicale Solidaires, l’instauration d’une TVA « sociale »
serait un nouveau cadeau au patronat, sans effet sur les
délocalisations, et mettant encore plus à la charge des salariés ce qui
doit être de la responsabilité de l’entreprise. A l’inverse l’Union
syndicale Solidaires préconise un nouveau partage de la valeur ajoutée
qui soit plus favorable aux salariés et qui rééquilibre la baisse de
près de 10 points des salaires (salaires directs et cotisations
sociales) ayant eu lieu depuis près d’un quart de siècle.